Bonjour Véronique,
Tout d’abord, je vous remercie pour votre question et je tiens à m’excuser pour cette réponse tardive. J’ai été dépassé par les festivités de fin de période (examens, corrections, conseils de classes, réunion de parents) et les fêtes de fin d’année. Pour rappel, vous nous aviez posé la question suivante : « Comment motiver les enseignants lorsque notre société évolue, change à un rythme soutenu ? ». Votre question est assez complexe mais très intéressante. Après avoir effectué quelques recherches, je vous propose une réponse possible parmi d’autres. En effet, il s’agit uniquement de mon point de vue et de la synthèse de quelques documents dénichés au fil de mes recherches.
D’après une analyse intitulée « Démotivés, les profs ? » et publiée par le Centre Permanent pour la Citoyenneté et la Participation (CPCP) en 2012, « beaucoup dans le corps enseignant mettent en avant la démotivation comme principale conséquence d’un « mal-être » global, devenant une source de problèmes dans leur métier » (p. 3). Il est donc primordial de s’y intéresser comme problème de fond et celui-ci n’est visiblement pas récent comme le témoigne cette analyse... Il y est également souligné que « la plupart des raisons de la démotivation croissante des professeurs ne peut se régler moyennant des solutions purement matérielles comme des revalorisations de salaires par exemple » (p. 6). Si la revalorisation salariale ne peut suffire à (re)motiver les enseignants, comment pourrait-on y arriver ?
Une première piste est proposée par Lantheaume (2008, p. 54) dont l’évocation de « l’existence d’une usure résultant d’un sentiment d’impuissance à bien travailler est manifeste chez les enseignants » (p. 54). Cette usure pourrait être une des sources de démotivation et une des clés du problème. L’auteur précise que « selon la sociologie des professions et la clinique de l’activité, les groupes professionnels se stabilisent autour d’une idée du « bon travail », voire même du « beau travail ». C’est aujourd’hui un problème clé pour les enseignants » (p. 54). L’auteur ajoute que « la façon de définir ce qu’est le « bon travail » et sa définition même se transforment. Les nouvelles tâches, pour les enseignants, ne font pas partie du cœur du métier et inversent le poids respectif entre celles jugées jusque-là secondaires ou liées à des choix personnels et celles relevant du noyau dur du métier » (p. 54). Je pense donc que pour (re)motiver les enseignants, il est important que ceux-ci prennent conscience que leur travail a également évolué et qu’ils doivent (re)définir ce qu’est un « bon travail » en tant qu’enseignant en 2020. L’enseignant doit aussi être vigilent à ne pas se laisser entrainer par une résistance au changement.
Par rapport à ces résistances, Maroy (2006, p. 133) dit qu’« un premier type d’explication renvoie à la socialisation des enseignants, en particulier des anciens, qui, formés à un modèle de professionnalité antérieur (le modèle du « maître instruit » entre autres) résisterait aux nouveaux modèles (modèle du pédagogue et du praticien réflexif). Les résistances s’expliqueraient ainsi par des traits liés à la culture professionnelle des enseignants, qui seraient d’une part plutôt « individualistes » (Hargreaves, 1993 ; Huberman, 1993), d’autre part « relativement conservateurs » sur le plan pédagogique, attachés aux modèles pédagogiques auxquels ils ont été formés ».
En conclusion, pour répondre à votre question, je pense que pour (re)motiver les enseignants, ceux-ci doivent accepter le changement et l’évolution de leur travail. Ils doivent avoir conscience des enjeux actuels de l’enseignement et des contraintes spécifiques de celui-ci en 2020. En d’autres termes, ils doivent se « réinventer » en redéfinissant c’est qu’est un « bon travail » en tant qu’enseignant. N’est-ce pas la meilleure des motivations ?
A.L. pour enseignons.be