Par Bruno HUMBEECK*
Proposer un examen et le présenter comme une épreuve, ce n’est assurément pas la meilleure façon d’intégrer positivement l’évaluation dans un parcours d’apprentissage. Or, c’est à cela que doivent servir les évaluations si on souhaite qu’elles révèlent leur véritable intérêt : savoir où l’on en est pour poursuivre son chemin là où on souhaite qu’il nous mène.
Sur un parcours d’apprentissage, les évaluations sont des balises nécessaires. C’est par elles que l’on évite les excès de vitesse et qu’on limite le risque “d’aller dans le mur” parce que les compétences qui doivent être acquises pour s’engager dans un apprentissage ultérieur ne le seraient pas (et devraient dés lors être expliquées ou ré-expliqués) ou ne le seraient qu’insuffisamment (et supposeraient donc davantage d’exercices pour créer des automatismes cérébraux). Ces balises sont nécessaires et personne ne doit être effrayé à l’idée qu’on les pose. Bien au contraire, c’est leur absence qui crée un sentiment d’insécurité quand plus personne ne sait où il en est et que beaucoup éprouvent le sentiment d’avancer trop lentement, dans une mauvaise direction ou à un rythme différent que celui qui avait été prévu au moment où on a dressé les plans de route.
Mais une balise, pour jouer pleinement son rôle positif dans la régulation du rythme d’apprentissage de chacun, ne doit en aucun cas être perçue, encore davantage par les temps qui courent, comme une manière d’éliminer ceux qui n’avancent pas à la vitesse initialement prévue. C’est pour cela qu’un examen certificatif sous forme d’une épreuve qualificative ou disqualificative ne peut, dans un contexte qui a évidemment perturbé le niveau d’instruction atteint par tous et réalisé par chacun, qu’être terriblement mal vécu.
Pour qu’ils n’ajoutent pas de tension à ce qui est déjà vécu difficilement par les élèves – tout comme il peut l’être par les enseignants qui accompagnent leur parcours et par les parents qui observent leur évolution avec anxiété – il faut donc que les évaluations ne soient ni conçues ni perçues comme des examens éprouvants mais comme des balises qui donnent l’opportunité d’établir des bilans individuels et collectifs de façon à jalonner les parcours d’apprentissage en permettant à chacun de reprendre tranquillement sa vitesse de croisière...
C’est pour cela qu’il est important, pour chaque évaluation, de faire preuve de sérénité en gardant toujours en vue que l’élève qui réussit n’est pas celui qui réussit et réalise son parcours en un temps record mais celui qui, en dépit de toutes les embuches qui se dressent sur son chemin, préserve son plaisir d’apprendre...
Les examens présentés sous forme d’épreuves constituent incontestablement de ce point de vue un piège majeur... Les évaluations, si elles sont envisagées positivement par tous comme des opportunités de s’interroger à propos des erreurs commises et des occasions de repérer les zones de fragilité dans les apprentissages, ne portent généralement atteinte à ce qui doit toujours être considéré comme l’essentiel du patrimoine de chaque élève : le bonheur de découvrir, la satisfaction de maitriser et la joie de comprendre...
* HUMBEECK Bruno est psychopédagogue et auteur de nombreuses publications dans le domaine de la prévention des violences scolaires et familiales, de la maltraitance, de la toxicomanie et de la prise en charge des personnes en rupture psychosociale et/ou familiale. Il travaille à l'université de Mons.