Les mots de Bruno : Pense lentement !

Publié par Bruno Humbeeck* le 28/11/2023

Il faut pouvoir s’empêcher...” disait Camus en citant son père.
    Cette citation évoque parfaitement le rôle du système d’inhibition quand il est question pour celui-ci de préférer à une pensée intuitive, à une réponse instinctive ou à une réflexion impulsive qui incite à faire preuve de rapidité et de fulgurances sans se préoccuper outre mesure de fiabilité, de la pensée réfléchie, de la réflexion soupesée et de la réponse nuancée qui se révèle inévitablement plus lente dans la mesure où elle implique l’intervention du cortex.
    Pense lentement pour te donner le temps de réfléchir.”

    Penser en lenteur, poser sa réflexion, peser ses mots, se donner le temps d’envisager avec précaution, d’élaborer avec circonspection, de construire une réflexion avec la patience de celui qui préfère le mot juste à la phrase spontanée...
    Voilà sans doute, pour l’intelligence humaine, le plus grand défi dans un monde qui fait de la saillie immédiate, du slogan fulgurant et de l’esprit de répartie le fleuron d’une intelligence qui ne vaudrait que par la vitesse de sa mise en mouvement.
    
    Dans un contexte comme celui-là, l’intelligence se manifeste sans doute essentiellement par la mise en mouvement d’un troisième système, celui qui permet de contrôler l’impatience du premier système – celui des circuits courts de la pensée – pour laisser la place au deuxième système qui ralentit la réponse en la soumettant à l’examen du deuxième système chargé de la mise en mouvement des circuits longs de la réflexion raisonnée...
    Il n’est évidemment pas facile de résister à la tentation de la réponse rapide et intuitive quand la plupart des jeux télévisés soumettent par exemple la réponse des candidats à un chronomètre qui impose de répondre le plus vite possible ou attribuent la victoire à celui qui donne la réponse plus rapidement que les autres candidats. C’est le même enseignement que l’enfant retire chaque fois que ses parents, par exemple dans les devoirs scolaires, ont tendance à adopter le même souci d’obtenir des réponses rapides notamment pour ne pas que le temps des devoirs scolaires s’éternisent...
    L’enfant, trés précocement, apprend de cette façon à penser à toute vitesse en stimulant la mise en mouvement du système 1 au lieu de celle, plus lente, du système 2 et en zappant le rôle d’arbitre entre les deux systèmes que devrait jouer le système 3 en inhibant la réponse rapide au bénéfice d’une recherche plus lente de la réponse dés lors que celle-ci est soumise à l’analyse du cortex...
    C’est pour cela qu’un enfant qui comprend lentement révèle, contrairement à ce qui lui est dit et à l’image qu’il finit par se faire de lui-même, une intelligence plus consistante que ceux qui pensent que la rapidité constitue, dans le registre cognitif, le principal indicateur de l’efficacité intellectuelle.
B.H.

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* HUMBEECK Bruno est psychopédagogue et auteur de nombreuses publications dans le domaine de la prévention des violences scolaires et familiales, de la maltraitance, de la toxicomanie et de la prise en charge des personnes en rupture psychosociale et/ou familiale. Il travaille à l'université de Mons. Retrouvez ces publications sur son site : www.outilsderesilience.eu


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