Du 10 au 12 décembre se tenait le festival pédagogique Barak@TIC 2024, organisé par les technopédagogues de Wallonie-Bruxelles Enseignement (WBE). La deuxième journée s’est conclue sur une conférence de Pierre Dillenbourg, professeur à l'École polytechnique fédérale de Lausanne, qui a rappelé l’importance pour le personnel scolaire de considérer les outils numériques comme des éléments d'un écosystème pédagogique organisé et de l’inutilité d’étudier leurs impacts hors contexte.
Par Audrey Miller pour l'Ecole Branchée
La Barak@TIC est une initiative destinée à promouvoir les compétences numériques et l’innovation technologique. Elle propose des ateliers et des conférences en ligne qui se veulent accessibles au plus grand nombre d’enseignants. Pour plus de détails, vous pouvez visiter le site de l’édition 2024 de l’événement ici.
Lors de la deuxième journée, nous avons assisté à la conférence de Pierre Dillenbourg, ancien instituteur primaire belge et actuel professeur à l’École polytechnique fédérale de Lausanne, qui a captivé l’auditoire avec son approche non conventionnelle des technologies éducatives. En introduisant son discours, il a clairement établi que son but n’était pas d’innover pour l’innovation elle-même, mais plutôt pour résoudre des problèmes concrets rencontrés dans l’éducation.
Dillenbourg a souligné l’importance d’étudier l’efficacité réelle des technologies dans leur contexte éducatif, selon leur application pratique en classe, et non pas comme outils en soi. D’ailleurs, il estime que l’efficacité d’une technologie dépend de la manière dont elle est intégrée dans un scénario pédagogique global, qui prend en compte les besoins des élèves et les objectifs d’apprentissage.
Il a cité l’exemple de la table de réalité augmentée pour les apprentis en logistique créée par sa propre équipe. Bien que l’outil ait été bien accueilli par les enseignants et les étudiants au départ, les premières évaluations n’ont montré aucune différence significative en termes d’apprentissage par rapport aux méthodes traditionnelles. Toutefois, après avoir modifié la manière dont l’enseignant utilisait la table, en encourageant la réflexion et la prédiction avant la simulation, des résultats positifs ont été observés.
C’est pourquoi il encourage les enseignants à penser la technologie comme un élément d’un écosystème pédagogique. Tout comme on alterne entre des moments d’interaction avec toute la classe, en équipe ou individuelle, on peut intégrer des technologies ou non. L’important est de créer un ensemble cohérent où ces dernières servent de leviers pour l’apprentissage.
Comme autre exemple, il indique que lorsqu’un enseignant fait utiliser une tablette à ses élèves, il ne faut pas y voir un désir automatique de remplacer l’écriture sur papier par l’écriture sur tablette : il s’agit d’intégrer la tablette comme un outil parmi d’autres dans un environnement pédagogique diversifié. Il donne l’exemple d’une classe où les enfants pourraient participer à différents ateliers : écriture sur tablette, activités dans un bac à sable, écriture sur le dos d’un camarade, et bien sûr, écriture sur papier.
De ce fait, il critique l’idée qu’il faudrait choisir entre le numérique et le papier. Il compare cette opposition au choix entre le ski et le vin : pourquoi choisir? On peut faire les deux! (Peut-être pas en même temps, ajoute-t-il avec humour!) Un enseignant peut utiliser tous les outils à sa disposition, numériques et non numériques, pour favoriser l’apprentissage de ses élèves.
Il souligne que l’obsession de mesurer l’efficacité des technologies éducatives conduit à des expériences qu’il qualifie « d’absurdes », comme celle de comparer des enfants qui n’écrivent que sur tablette à des enfants qui n’écrivent que sur papier. Dans la réalité, un enseignant compétent utilisera une variété d’outils et d’approches pour répondre aux besoins de ses élèves.
Il défend par ailleurs l’idée que les tablettes, utilisées de manière judicieuse et intégrée à une pédagogie globale, peuvent être un outil précieux pour l’apprentissage, sans pour autant entraîner une augmentation excessive du temps d’écran.
Il a aussi illustré son propos en partageant plusieurs initiatives développées ou étudiées par son équipe, toutes axées sur la résolution pratique de problèmes en classe :
Ces technologies démontrent l’approche de Dillembourg qui privilégie des solutions simples, mais efficaces, pour répondre à des problèmes spécifiques en éducation, évitant ainsi l’innovation gadget au profit de résultats tangibles et pratiques.
Qu’en dites-vous?
Par Audrey Miller pour l'Ecole Branchée