Le risque est de coloniser, par l'éducation notamment, la capacité à s'émerveiller. Cela se traduit par une confusion entre le merveilleux et le convenu. 

C'est cette confusion qui se produit notamment chaque fois que l'on explique à un enfant, à un adolescent ou à un adulte qu'il doit s'émerveiller parce qu'il est devant une œuvre reconnue, spectaculaire ou appréciée des "connaisseurs". 

Le merveilleux ne s'impose pas et surtout, l'émerveillement suppose aussi qu'on accepte de ne pas comprendre la raison de cet émerveillement. 

C'est pour cela qu'il faut laisser faire le merveilleux et compter sur ses deux principaux alliés : le temps et le silence. 

Prendre son temps et se taire... Voilà donc le cahier de charge préalable d'un adulte qui accompagne un enfant ou un adolescent dans un musée. En tant qu'adulte son rôle n’est pas de désigner aux enfants - et encore moins aux adolescents - ce qu'ils sont censés apprécier ou non, en leur imposant ou en les dirigeant exclusivement vers ce qui est supposé susciter leur émerveillement. 

Il vaut beaucoup mieux leur demander : "Qu'est-ce que tu aimes spontanément ? Quelles sont les œuvres qui t'attirent ?" En leur proposant, par exemple, d'aller choisir dans une pièce, la peinture qui leur plait le plus. 

Ensuite, sans émettre de jugement, il faudra juste se taire et regarder... en se donnant le temps de contempler ensemble en silence avant seulement, éventuellement, d'en parler pour échanger à propos des motifs qui expliquent pourquoi cette œuvre suscite chez eux davantage d'émerveillement que les autres...